Cumul or not Cumul ?
Tribunal Judiciaire de PARIS, Juge des Loyers Commerciaux, 3 mai 2024, RG n°20/02927
Tribunal Judiciaire de PARIS, Juge des Loyers Commerciaux, 3 mai 2024, RGn°20/02927
● Propos préliminaires.
L’éventuel cumul des abattements au titre des travaux en matière hôtelière à l’occasion d’un renouvellement judiciaire est une problématique récurrente mais au sujet de laquelle il subsistait des incertitudes en présence d’une clause d’accession en fin de jouissance (ou d’une clause d’accession en fin de bail comprenant un nivellement, dont on sait qu’elle s’interprète selon une jurisprudence constante, comme une clause d’accession reportant ses effets en fin de jouissance).
Dans l’Observatoire des loyers judiciaires paru fin 2023 (FRUCHTER S., BETAILLE A., CORNATON M., « Douzième édition de l’Observatoire des loyers judiciaires PARIS : 2009 – 2023 », AJDI 2023, Etude, p. 902), la doctrine expertale avait d’ailleurs relevé que :
« Les conséquences en matière d’estimation de la valeur locative des hôtels seraient particulièrement importantes, l’ensemble des travaux réalisés par le locataire ne faisant accession au profit du bailleur qu’en fin de jouissance entraînant, à chaque renouvellement, l’application d’un abattement pour travaux de plus en plus élevé, le montant cumulé des travaux étant de plus en plus important. A notre connaissance, aucune décision n’est encore intervenue dans ce contexte ».
C’est désormais chose faite avec le jugement rendu le 3 mai 2024 par le Juge des loyers commerciaux du Tribunal Judiciaire de Paris (RG n°20/02927) appelé à statuer sur le cumul des abattements dans une telle hypothèse.
● Cumul d’abattements pour travaux hôteliers.
Aux termes de cette décision, il a notamment été jugé que :
§ en vertu des dispositions du Code du tourisme et notamment de l’article L. 311-3 dudit code, les bailleurs ne pouvaient prétendre à aucune majoration de loyer du fait de l’incorporation à l’immeuble des améliorations résultant de l’exécution des travaux ;
§ les dispositions du Code du tourisme « ne sont pas exclusives des stipulations du contrat de bail relatives à l’accession au bailleur des travaux réalisés dans la mesure où l’article L. 311-1 du Code du tourisme ne vise qu’une catégorie précise de travaux. En ce qui concerne les travaux qui ne relèvent pas de ces dispositions, l’accession ne peut prendre effet qu’au départ du preneur des locaux loués et les travaux qu’il a réalisés ne peuvent pas être pris en considération lors de l’évaluation du loyer du bail renouvelé ».
En résumé : A CHAQUE TRAVAUX, SON REGIME, ET A CHAQUE REGIME, SON ACCESSION. **
Raison pour laquelle le Juge opère ici une distinction selon qu’il s’agit des travaux hôteliers visés de manière limitative à l’article L. 311-1 du Code du tourisme, lesquels bénéficient d’un régime protecteur d’une durée de douze années, et les autres travaux non visés par lesdites dispositions qui suivent alors le sort prévu par les seules stipulations contractuelles.
Le régime spécifique résultant des dispositions du Code du tourisme ne ferait donc pas échec aux stipulations contractuelles concernant l’accession en fin de jouissance pour les seuls travaux non-visés à l’article L. 311-1 du Code du tourisme.
Il convient donc de procéder à une répartition des travaux selon leur nature et de distinguer les clauses qui prévoient une accession au profit du bailleur en fin de bail et de celles prévoyant une accession en fin de jouissance qui permettent dans ce cas de revendiquer un abattement pour les travaux ainsi réalisés par le preneur. A l’heure du verdissement du bail commercial, pensez au tri sélectif de vos travaux pour mieux les valoriser.
Accession en fin bail avec ou sans clause de nivellement ou encore accession en fin de jouissance, la rigueur est donc de mise pour leur rédaction.
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